Cadi et Bounaou

A chaque début de saison alors que  j’attelle mon pulvérisateur pour m’en aller traiter au cuivre mes
vignes contre le mildiou je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour un vieux couple qui vivait au
début du siècle dernier : Cadi et Bounaou.

En ce début du 20eme siècle la parade au phylloxera ayant été trouvé chacun replantait une ou deux
parcelles dans le but de produire son vin pour ses besoins quotidiens et , si la récolte était bonne, en
vendre au courtier qui rachetait les surplus.
Cadi et Bounaou étaient de ceux là et tout au long de l’année bichonnaient leur vignes. Depuis quelques
années une nouvelle maladie ,le mildiou, était apparue qui détruisait feuilles et raisin. La parade : mettre
du sulfate de cuivre sur la végétation des vignes afin que le champignon ne puisse s’y développer, l’on
appelait cela sulfater.

Au tout début la sulfate de cuivre était préparée dans un seau et on l’appliquait en envoyant de grosses
gouttes du produit sur les feuilles avec un brin de romarin. La technique était efficace mais longue et
pénible.
Bientôt les premiers Cugeois achetèrent des sulfateuses à dos entièrement en cuivre qui permettaient de
pulvériser et répartir beaucoup plus harmonieusement et finement le produit sur tout le feuillage. Bounaou
vit plusieurs de ses collègues utiliser cette magnifique machine brillante de tous ses cuivres à la
pulvérisation si efficace.
Après avoir encore passé une saison à bénir ses vignes à grand coup de romarin et avoir sauvé la récolte
Bounaou décida de sauter le pas et acheter lui aussi une « sulfateuse ». Lorsqu’il parla de son projet à
Cadi ce fut l’orage. Tout y passa de l’efficacité du brin de romarin à la dépense inutile en passant par des
pannes incontournables et ,elle ne l’avait pas vérifié mais bon…, une consommation plus importante de
produit sans oublier que cet argent l’on pouvait le mettre ailleurs. Bounaou laissa passer l’orage,les
brigues et au bout de quelques discussions enflammées sortit l’argument choc « avec cette machine je
ferai beaucoup plus de travail et tu n’auras plus besoin de venir m’aider.
Quelques temps pus tard il revint d’Aubagne avec sa machine toute rutilante.

L’heure du premier sulfatage arriva. Bounaou partit sa sulfateuse pleine de produit sur le dos suivi de
Cadi qui bien qu’au chômage voulait voir à tout pris cette première. Arrivé au champ il mit sa machine en
pression et commença à pulvériser. Au bout de quelques vignes il fut stoppé par les cris et récriminations
de Cadi : cette machine n’envoyait pas assez de produit c’est un travail qui ne servait à rien vite revenons
au romarin. Ce fut l’intervention de trop. Bounaou se retourna lui dit : « elle n’envoie pas du produit tiens
regarde » En quelques secondes Cadi se retrouva bleue de la tête au pied. Il ne lui resta plus qu’à battre en
retraite bleue et verte de rage. L’histoire s’arrête là et ne dit pas quel fut l’accueil de Bounaou à son retour
à la maison.

L’anecdote traversa les années pour venir un siècle plus tard finir sur votre écran. Cadi et Bounaou ne
l’avaient sûrement pas imaginé.

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